Relâchez cette Sorcière | Release that witch | 放开那个女巫
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Chapitre 189 : Des Stars et des fleurs
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Il n’y eut ni lever de rideau, ni introduction. Les ײcoulissesײ n’étaient séparées de la scène que par une planche. Il n’y avait pas non plus de décors et pour la plupart des acteurs, ce serait la première représentation publique de toute leur vie.

– « Cette histoire se déroule dans la capitale d’un royaume. Aux abords de la ville vivait une belle jeune fille au grand cœur… »

Accompagnée par la voix du narrateur, Irène s’avança lentement sur la scène. Elle portait pour tout vêtement une robe sale et grise, avait les cheveux affreusement emmêlés et son visage était couvert de poussière.

Balançant le balai qu’elle tenait en mains, elle se mit à nettoyer soigneusement le sol. De temps en temps, l’actrice allait même jusqu’à se pencher pour essuyer une tache rebelle avec le bas de sa robe.

Après plusieurs jours de répétitions, Irène connaissait maintenant l’histoire par cœur. La pièce, assez simple, relatait la vie d’une jeune fille qui, ayant perdu sa mère, était constamment maltraitée par sa famille.

Une sorcière, touchée par sa gentillesse, utilisa ses pouvoirs pour lui permettre d’assister à un bal donné à la cour où le Prince et elle tombèrent amoureux dès le premier regard.

Mais comme la magie de la sorcière n’était efficace que pour un temps limité, elle fut contrainte de quitter précipitamment le bal et, dans sa panique, perdit une chaussure de cristal. Le Prince fit fouiller toute la ville dans l’espoir de retrouver cette belle jeune fille. Il finit par la retrouver aux abords de la capitale et à compter de ce jour, tous deux vécurent heureux pour toujours.

Dans cette histoire facile à comprendre, le sujet se détachait totalement de la traditionnelle description de l’amour entre un prince et une princesse. Ici, c’était une sorcière qui venait en aide à une jeune fille du peuple connue pour sa bonté et lui permettait de gagner les faveurs du Prince. Pour l’actrice qui interprèterait Cendrillon, le moment où le personnage rassemble tout son courage pour résister à l’oppression qu’elle avait passé sa vie à subir serait le point culminant de sa performance.

C’est pourquoi Irène n’aurait jamais pensé que May lui laisserait le premier rôle.

Elle était déjà suffisamment euphorique à l’idée que la star du Territoire de l’Ouest soit prête à partager la scène avec elle. En tant que pilier du théâtre de la Forteresse, May était suffisamment fière et confiante pour jouer le rôle principal sur toutes les scènes, pourtant, dans ײCendrillonײ, elle avait pris l’initiative de jouer un second rôle : la demi-sœur.

La jeune actrice avait peine à le croire, jusqu’à ce que l’autre lui explique avec insistance qu’il s’agissait d’une performance d’un nouveau type et qu’Irène avait le talent nécessaire pour jouer Cendrillon.

Au cours des répétitions suivantes, elle mit tout son cœur à reprendre et reprendre encore chaque scène et même lorsqu’elle était allongée sur son lit et avait soufflé les bougies, elle se repassait les conseils que May lui avait donnés afin d’être certaine d’être à la hauteur des faveurs que cette dernière lui avait faites.  

Heureusement, Irène n’était pas dépourvue d’expérience. Lorsqu’elle se retrouva sur scène devant toute cette foule, elle se détendit et laissa remonter un à un les gestes qu’elle avait maintes fois répétés. Elle se sentait en pleine possession de ses moyens et n’avait commis aucune erreur jusque-là. Il lui arrivait même d’encourager du regard Rosia qui interprétait la sorcière lorsque celle-ci oubliait son texte.

– « Je partage la bouillie de blé en deux, mais ne mangez pas trop vite : c’est très chaud. »

– « Merci pour votre gentillesse, jeune fille. Assurément je vous le revaudrai. »

Lorsque Rosia tourna les talons pour repartir en coulisses, les spectateurs se mirent à applaudir les uns après les autres. Irène se sentit soulagée. Au théâtre de la Forteresse, oublier ses mots au cours d’une représentation publique était une erreur intolérable. Au lieu d’encourager l’artiste par des applaudissements, la noblesse se serait immédiatement mise à la huer et à la ridiculiser.

Puis ce fut au tour de May d’entrer en scène.

Il s’agissait d’interpréter un conflit entre la demi-sœur plus âgée et Cendrillon. Harcelée et humiliée par sa sœur aînée, Cendrillon était supposée se cacher au sous-sol et sangloter, le portrait de sa mère dans ses bras.

Mais alors que May se tenait devant elle, Irène sentit soudain que l’atmosphère avait complètement changé.

Elle n’était plus la star silencieuse et taciturne qu’elle avait été durant les répétitions. Elle régnait désormais sur la scène. Devant ses manières hautaines, ses gestes parfaitement exécutés et son regard où se lisait un mépris non dissimulé, Irène ressentit un fort sentiment d’oppression.

– « Oh, mais regardez qui voilà! Qui vous autorise à penser que vous pouvez vous dispenser de travailler en pleine journée ? »

« Misérable, vous allez remonter immédiatement et laver ma robe! »

« Et je vous conseille de faire attention! C’est une robe de cérémonie. Ne vous avisez pas d’y faire le moindre accroc. »

Sur ses paroles, May la repoussa fortement. Selon l’intrigue, Irène était censée faire semblant de tomber, mais sous le regard glacé de la star, elle ne put s’empêcher de reculer de quelques pas et trébucha accidentellement. Son coude heurta durement le sol qui n’avait pas  de revêtement amortisseur et une douleur fulgurante lui traversa le corps.

May ne lui prêta aucune attention. Elle si dirigea vers le centre de la scène et, devant la foule silencieuse, commença son monologue :

– « Vraiment, quel gaspillage… »

– « C’est tout à fait Mlle May, » murmura Margaret, stupéfaite. « En quelques mots, elle réussit à captiver l’attention. Elle vit littéralement son personnage. »

– « Impressionnant en effet », approuva Roland.

« Mais cette femme en fait trop, elle est beaucoup trop agressive. On aurait dit que l’horreur et le mépris qu’elle montrait à l’égard d’Irène étaient réels. Même d’ici, j’ai ressenti sa cruauté. Son attrait émotionnel est communicatif, à en croire l’expression du public. Cependant, elle n’est pas le protagoniste. Elle a réussi à faire oublier Irène, qui jouait relativement bien. Si cela continue, j’ai bien peur que le rôle principal ne soit éclipsé par un personnage secondaire. »

Irène était stupéfaite.

Elle savait qu’il lui faudrait se relever au plus vite. Le monologue de May, qui portait principalement sur le fait qu’elle se languissait de revoir le prince ainsi que sur le bal de la cour, ne durerait pas longtemps. Il fallait qu’elle sorte avant la fin de l’acte. Cependant, le sentiment d’aisance qu’elle avait eu au cours des répétitions avait disparu.

La scène lui était devenue parfaitement étrangère.

« Est-ce tout ce dont je suis capable ? » se demanda-t-elle.

Ce n’est que lorsque May, qui avait terminé sa tirade, lui envoya sa jupe au visage en passant, qu’elle trouva la force de se reprendre.

La star n’avait pas dit un mot, mais dans son regard froid, Irène comprit. May lui intimait de se ressaisir. Dans la mesure où ces deux personnages étaient comme le feu et l’eau, l’actrice ne pouvait lui tendre la main faute de quoi la pièce serait ruinée!

Elle serra les lèvres et ressentit un goût de fer dans sa bouche. Voyant May disparaître derrière la planche, elle voulut elle aussi se lever et sortir. Mais Gand et Sam, qui apportaient les accessoires, étaient déjà sur scène.

Sam posa un seau devant elle et profita de l’occasion pour lui souffler discrètement :

– « C’est encore à vous, restez ici pendant que nous travaillons. Courage, vous pouvez le faire! »

Ce n’était pas  dans le script. En réalité, Irène avait manqué sa sortie.

Le public assista à un changement de décor inhabituel. Cendrillon était immobile sur la scène, tandis que Grand et Sam remplaçaient la belle table ronde et les chaises de bois par des tonneaux et paniers de rotin, transformant le salon en sous-sol. Tandis qu’ils allaient et venaient, la jeune femme restait immobile, comme figée par le temps.

Dans l’acte suivant, Cendrillon, enfermée au sous-sol, était secourue par la sorcière qui lui remettait de beaux vêtements ainsi qu’un carrosse qui devait l’emmener au château.

– « N’oubliez pas : le sort ne durera que jusqu’à minuit. Vous devrez donc quitter le palais avant le dernier coup de cloche ou les vêtements et la voiture disparaîtront. »

– « Euh… j’ai bien compris. Je vous remercie. »

Irène, incapable de sortir de sa torpeur, se cacha dans les coulisses pour regarder jouer May. Elle se disait que l’actrice était vraiment à l’aise. Devant plus d’un millier de spectateurs, elle gardait son sourire épanoui. Quelle femme puissante!

À se retrouver sur scène face à cette grande star, elle comprit à quel point son homologue était étonnante.

« Ainsi, il y a autant de distance entre une étoile et une fleur ? »

Rosia ayant terminé sa réplique, il était temps de passer à la scène suivante : le bal de la cour.

Pour créer l’illusion, toute la troupe dut monter sur scène : May, Gand, Sam, Rosia et Tina, qui devaient figurer les danseurs, vêtus comme des nobles et portant des masques, et dans le rôle du Prince, Ferlin, l’homme qu’elle aimait.

 

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