Relâchez cette Sorcière | Release that witch | 放开那个女巫
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Chapitre 656 : L’Oracle et l’Élu
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Banach entendit dans sa tête une voix féminine :

– « Je vous en prie, parlez librement.  Que s’est-il passé ? »

Il lui suffisait de penser pour transmettre sa réponse. Même si, au départ, cette façon de communiquer le déconcertait, il devait admettre qu’elle était beaucoup plus rapide et plus efficace. Par ailleurs, il était difficile de mentir.

Banach fit donc part à l’oracle des évènements :

« Oracle Sacré, il s’est passé quelque chose d’inattendu. Elles ont refusé l’invitation de l’Ambassadeur de Graycastle. C’est ma faute, je n’aurais jamais cru qu’elles seraient aussi méfiantes. »  

L’Oracle ne parut pas en prendre ombrage. Tristement, elle répondit :

« Il est difficile de prédire la réaction des gens.  Avez-vous un moyen d’y remédier ? »

« Elles finiront par accepter l’invitation, ce n’est qu’une question de temps. » Il marqua une pause avant d’ajouter. « Elles n’ont pas le choix, avec la nouvelle politique de Sa Majesté Alban Misra. »

« Pfff… ce n’est qu’un homme ordinaire. »

Surpris, Banach demanda :

« Que puis-je pour vous, Oracle Sacré ? »

« Je n’aime pas cette politique de suppression des sorcières. Pouvez-vous me promettre que personne ne sera blessé ? »

« Je… »

Banach ne savait que répondre : avec cette nouvelle loi, certaines sorcières allaient sans doute être capturées, voire même tuées. l’Oracle lui avait simplement ordonné de les conduire vers le sud, jusqu’à la Région de l’Ouest du Royaume de Graycastle, mais pas d’assurer leur sécurité. Aussi pensait-il qu’elle ne se souciait pas de savoir combien survivraient au voyage.

« C’est donc ce que vous pensez ? » Dit l’Oracle, élevant soudain le ton.

Ses tentacules s’agitèrent et la lave brûlante se mit à monter, témoignant de sa colère. « N’oubliez pas ce que j’ai dit : jusqu’à la fin du monde, chaque sorcière est cruciale! »

À sa réaction, Banach comprit que quelque chose n’allait pas. Sans le vouloir, il lui avait fait part de ses pensées car il ne pouvait rien dissimuler sans qu’elle ne le sache.

Très vite, il s’expliqua :

« Non, Oracle Sacré, je n’ai rien oublié de vos paroles. Moi non plus je ne tiens pas à faire souffrir des innocents. Mais il va me falloir du temps pour réorganiser mes gens. Tout le monde n’a pas le courage suffisant pour défier les ordres du Roi et de garder le secret. »

« Mes gardes vous aideront. Combien de temps cela prendra-t-il ? »

Banach, qui avait déjà été témoin des capacités des gardes en question, soupira, soulagé.  D’une manière générale, les chevaliers n’étaient pas en mesure de rivaliser avec eux, certains, moins aptes que d’autres, ne parvenant même pas à discerner leurs mouvements. Deux ou trois de ces gardes suffiraient à vaincre entre vingt et trente chevaliers, preuve de plus de l’extraordinaire pouvoir de l’Oracle.  

« Je pense pouvoir achever la troisième étape du plan d’ici deux semaines. »

« Très bien, alors faites-le. »

« Oracle Sacré… » Dit Banach, hésitant. « Les sorcières sont-elles vraiment si importantes ? Sont-elles les seules bénies des dieux ? En termes de richesse ou de pouvoir, je ferais un meilleur… »

« Un meilleur Élu ? » Coupa l’Oracle. « Vous ne savez pas de quoi vous parlez.  Ni la richesse ni le pouvoir ne vous seront utiles lorsque la fin du monde se produira. Les divinités recherchent un sauveur qui sache utiliser le pouvoir divin et non d’un porte-parole humain. Quoi qu’étant un homme ordinaire, vous m’êtes très utile et lorsque votre mission sera terminée, je vous récompenserai comme vous le méritez. Je peux vous offrir l’immortalité, mais n’oubliez pas qui vous êtes. ».

Banach savait ce que signifiait ce jour. Tous les quatre cents ans, une lune sanglante apparaissait dans le ciel, puis les Portes de l’Enfer s’ouvraient, libérant des démons qui se répandaient sur tout le continent et massacraient les êtres humains. Seul l’Élu pouvait faire face à ces cruels adversaires.

Cette conversation lui en apprenait davantage au sujet de ce mystérieux Élu. De toute évidence, L’Oracle était à la recherche d’une personne capable de communiquer directement avec les puissantes divinités. Et cette personne ne pouvait-être qu’une sorcière.  

Ne voulant pas renoncer, il insista :

« Mais… Etes-vous certaine que l’Élue se trouve parmi les sorcières du Royaume de Graycastle ? »

Il y eut un long silence après quoi l’Oracle répondit :

« Nul ne le sait. Ce n’est qu’une tentative. Nous l’avons fait maintes fois au cours des dernières centaines d’années. »

« Et si jamais nous échouons une fois de plus, que ferons-nous ? »

« Nous continuerons à chercher, et ce jusqu’à la fin du monde, jusqu’à ce que le monde des humains soit totalement détruit. »  

« À quoi bon acquérir l’immortalité si l’humanité est détruite ? » Se demandait Banach. Il eut un sourire amer et répondit :

« Je vois. Je ferai mon possible pour mener à bien la mission. »  

La forme indistincte agita joyeusement ses tentacules : de toute évidence, l’Oracle était satisfaite.

« Autres chose. Est-il exact que l’Église a été vaincue ? »  

En effet, le Royaume de l’Aube avait appris la défaite écrasante de l’Église, l’Oracle accordait une attention particulière à cette question.

Elle avait même ordonné à Banach d’envoyer ses hommes à la Crête du Vent Glacé pour s’assurer de la véracité des faits.  

« Absolument. On aurait dit que leur champ de bataille avait été piétiné par des bêtes démoniaques. Partout, on pouvait voir de profondes fosses ainsi que des tranchées autour desquelles s’élevaient des milliers de tumulus. Le Roi a ramené tous ses soldats morts dans la Région de l’Ouest et enterré ou brûlé sur place tous les corps de ceux de l’Église. Les marchands qui revenaient du plateau d’Hermès nous ont dit qu’à la Cité Sainte, autrefois prospère, il régnait un silence de mort. »

« C’est terminé pour eux… » Dit l’Oracle d’une voix étonnement douce. L’instant d’après, elle se reprit : « Ce sera tout pour aujourd’hui, je suis fatiguée. »

« Bien, Oracle Sacré », répondit Banach en s’inclinant.

La scène souterraine et ses torrents de lave disparurent comme une marée qui reflue et, à nouveau, ils se retrouvèrent plongés dans l’obscurité. Les Pierres Magiques se remirent à clignoter avant de se rallumer. Aussitôt, la salle de pierre fut à nouveau éclairée.

On aurait dit que tout ce qui venait de se passer n’était qu’un rêve.

Un garde s’approcha de Banach et lui remit une fiole de porcelaine en disant :

– « Voici votre remède. Prenez-le et sachez que l’Oracle Sacré est ravie du travail que vous avez fait. »

– « Remerciez l’Oracle Sacré. »

Tout excité, Banach prit la bouteille et avala la totalité du liquide.

Aussitôt, il sentit un flux de chaleur jaillir de son estomac et revigorer tout son corps. Ce remède avait le pouvoir de lui rendre son agilité et sa rapidité, cependant, les effets ne duraient pas très longtemps. Il ne pouvait pas non plus prolonger sa vie. D’après l’Oracle, la potion était en mesure d’améliorer sa santé, de soulager sa fatigue et de restaurer rapidement sa vigueur. Il devait prendre ce remède afin de fortifier son corps affaibli sans quoi il ne survivrait pas à la douleur intense générée par le processus d’immortalisation.

Le fait qu’elle se soit montrée honnête au sujet de cette potion avait renforcé sa foi en elle. En effet, si elle avait voulu le duper, il lui aurait suffi de lui offrir ce remède magique dont l’effet rajeunissant pouvait attirer bon nombre d’aristocrates et de riches marchands comme lui.

Trois ans auparavant, il se déplaçait dans un fauteuil roulant poussé par un domestique. À présent et grâce à ce remède, il pouvait se tenir debout et marcher.

Si, après avoir accompli la mission que l’Oracle lui avait confiée, il obtenait l’immortalité, tous les problèmes épineux qui le préoccupaient seraient résolus en douceur.

Dos droit, tête relevée, Banach souleva le rideau qui masquait l’entrée de la caverne et emprunta l’escalier creusé à même la roche.  

Malgré les vents froids et humides, il se sentait maintenant plein d’énergie.

Il marchait d’un pas régulier et le grondement de la rivière souterraine en contrebas évoquait à présent le son de cornes destinées à l’encourager.

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